Les cloches résonnent dans ce ciel orange... Mes mains sont jointes. Accroupi devant l'autel de ma dernière heure, je songe à ce que mes yeux ont vu, et qu'ils ne pourront plus jamais voir. Je saisis le miroir de ma jeunesse, et passe mon visage au travers de ce vitrail aqueux...
Je
me souviens de ce champs de coquelicot, dont l'atmosphère se
chargeait en pollen. Et de cette jeune fille... Ses mains semblaient
avoir entourer l'étendue fleurie d'une vitre invisible. Ce
terrain était son endroit secret. Ses cheveux étaient des rayons de
soleil se balançant au gré des vents tièdes... Ses yeux étaient
des vitraux qui donnaient sur le ciel bleu, tant leur éclat couleur
saphir était envoûtant. Je la revois encore caresser les
coquelicots tout en chantonnant un air gai...
Cette
vitre, je l'ai touchée toute ma vie. Je contemplais ce paradis
terrestre. Je m'asseyais devant sa prairie tous les jours. Elle
illuminait ce coin de la planète rien qu'en dansant. Parfois, je
l'ai peinte, j'ai écrit des poésies en l'honneur de sa grâce et de
cette beauté intemporelle.
Toute
ma vie, j'avais contemplé ce vitrail haut en couleurs, comme je
regardais attentivement chaque soir les étoiles luisantes qui
vivaient au dessus de ma maison... Je tendais la main pour atteindre
ce que me bloquait ces vitres...
J'avais
redoublé d'effort pour pouvoir aller dans ce champs de coquelicots,
pour pouvoir enfin parler à cette jeune femme aux cheveux
ensoleillés... J'avais mille et une fois essayé, de m'envoler dans
le ciel étoilé pour aller dormir contre les astres... Seulement ces
vitres restaient là.
Je
m'effondrais en larmes devant mon incapacité, je frappais aussi fort
que je le pouvais pour traverser ces vitres... Mes mains percutaient
avec violence ce vitrail du rêve, qui restait intacte, immobiles,
moqueur... Je perdais espoir, je retournais devant le champs pourpre.
La tête dans les mains...
J'entendis
un bruit de choc. La jeune femme se tenait contre la vitre, elle me
regardait. Je m'approchais rapidement de cette barrière. Elle
étendit sa main sur la surface incassable, m'incitant à en faire de
même. Je la posai, elle me sourit... Puis elle disparut...
La
jeune femme aux rayons de soleil et au ciel bleu, partit à jamais de
mon, Monde. Les étoiles cessèrent de briller. Je plaçai une vitre
autour de moi. Je m'enfermai à jamais dans cet endroit clos...
Mes
yeux s'ouvrirent... J'étais dans cette église. Les vitraux
multicolores éclairaient de milles feux, la pièce de tristes
pierres. Je voulais m'en aller, en finir... Vivre avec un rêve, mais
sans jamais le saisir... Je ne pouvais le supporter. La porte de la
cathédrale s'ouvrit... Une femme arriva pour rompre ce silence
morne. Sa chevelure blonde flottait encore et toujours, ses
yeux bleus vinrent remplir mon océan de joie. Elle était
vêtue d'une robe de coquelicot entrelacés les uns avec les
autres...
Nous
marchions l'un vers l'autre, quand une vitre nous bloqua... Elle
tendit la main, j'en fis autant... La vitre éclata... Mon rêve
s'accomplissait...
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